FESTIVEROS

LE SIGNE DE LA CROIX 


Adorez la croix de l'amour 

Qui se forme de quatre roses, 

Deux en bouton, et deux écloses, 

Trois fleurs de nuit, une de jour. 


Voici pour ce Dieu que j'honore 

Le symbole qui dit: Je crois! 

Quatre baisers donnés en croix 

Sur les quatre fleurs qu'il colore : 


Sur les lèvres, dont le carmin 

Fait honte aux roses purpurines, 

Où. deux beaux rangs de perles fines 

Brillent, comme dans un écrin; 


Puis, en descendant de la bouche 

A gauche, à droite tour à tour, 

Sur deux seins dont le pur contour 

Frémit du baiser qui les touche; 


Et plus bas, sur celle des fleurs 

Qui ne reçoit, tendre et craintive, 

Lardent baiser d'une foi vive 

Qu’en y répondant par des pleurs. 


De ce culte tel est l’emblème, 

Quand finit, quand renaît le jour, 

Signez-vous de la croix d’amour 

Devant la beauté qui vous aime. 


Théophile Gautier


Eh! Vous ne connaissiez pas comme ça notre Théophile!  🥳🥰

  

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Gamiani ou deux nuits d’excès 


Chantez, chantez encor, rêveurs mélancoliques, 

Vos doucereux amours et vos beautés mystiques 

Qui baissent les yeux ; 

Des paroles du cœur vantez-nous la puissance, 

Et la virginité des robes d’innocence, 

Et les premiers aveux. 

 

Ce qu’il me faut à moi, c’est la brutale orgie, 

La brune courtisane à la lèvre rougie 

Qui se pâme et se tord ; 

Qui s’enlace à vos bras, dans sa fougueuse ivresse, 

Qui laisse ses cheveux se dérouler en tresse, 

Vous étreint et vous mord ! 

 

C’est une femme ardente autant qu’une Espagnole, 

Dont les transports d’amour rendent la tête folle 

Et font craquer le lit ; 

C’est une passion forte comme une fièvre, 

Une lèvre de feu qui s’attache à ma lèvre 

Pendant toute une nuit ! 

 

C’est une cuisse blanche à la mienne enlacée, 

Une lèvre de feu d’où jaillit la pensée ; 

Ce sont surtout deux seins 

Fruits d’amour arrondis par une main divine, 

Qui tous deux à la fois vibrent sur la poitrine, 

Qu’on prend à pleines mains ! 

 

Eh bien ! venez encor me vanter vos pucelles 

Avec leurs regards froids, avec leurs tailles frêles, 

Frêles comme un roseau ; 

Qui n’osent du doigt vous toucher, ni rien dire, 

Qui n’osent regarder et craignent de sourire, 

Ne boivent que de l’eau ! 

 

Non ! vous ne valez pas, ô tendre jeune fille 

Au teint frais et si pur caché sous la mantille, 

Et dans le blanc satin 

Les femmes du grand ton. En tout tant que vous êtes, 

Non ! vous ne valez pas, ô mes femmes honnêtes 

Un amour de catin ! 


Alfred De Musset